Les Disques Bongo Joe poursuivent leur travail de réédition du brûlant rock kabyle des Abranis, véritables pionniers de la musique algérienne qui les premiers ont mélangé la musique berbère traditionnelle avec le rock, le folk, le disco et le funk, tout en célébrant fièrement leur héritage kabyle.'Amazigh Freedom Rock 1973-1983' suit la sortie en 2018 d'un premier single Chenar le Blues - Avehri sorti dans la série de 45T Bongo Joe. Cette compilation offre un regard exhaustif sur la discographie des Abranis, des expérimentations garage-rock de leurs débuts aux chefs-d'oeuvre fusion des années 1980.L'histoire des Abranis commence au milieu des années soixante, lorsque deux jeunes Algériens se croisent dans les quartiers bohèmes de Paris. Tous deux kabyles de Numidie, ils avaient fui leur pays avec leur famille suite à la montée nationaliste et conservatrice qui suit l'indépendance algérienne de 1962. Les deux jeunes gens, Shamy El Baz et Karim Abdenour, n'étaient pas liées que par des origines communes : tous deux aiment le rock et avaient à coeur de faire émerger un son algérien moderne, aussi bien inspiré par les rythmes et les mélodies kabyles que par le rock occidental. Le Paris cosmopolite des années 1960 leur a permis d'entrée en contact avec d'autres communautés nord-africaines, dont les sonorités ont fortement influencé le style des Abranis, mais aussi les tendances musicales de l'époque, du prog au disco.Les deux musiciens ont fondé Les Abranis en 1967, en s'associant au bassiste Madi Mehdi et au batteur Samir Chabane. Ensemble, ils ont expérimenté en mélangeant les voix et les mélodies kabyles avec le garage et le psych-rock. Les années qui suivent voient la sortie d'une poignée de singles sur plusieurs labels nord-africains basés en France, une tournée algérienne tapageuse et plusieurs changements de line-up. Shamy et Karim affinent leur mélange fougueux de kabyle et de rock, mais au fur et à mesure que les années 70 progressent, ils s'éloignent de plus en plus du garage et du psychédélisme de leurs débuts, et commencent à interpréter leur répertoire kabyle de manière plus ouverte et créative mélangeant kraut-rock, prog rock et influences early electronic.Sur 11 titres électrisants, 'Amazigh Freedom Rock 1973-1983' rend hommage à la puissance des Abranis et met en lumière leur héritage en tant que rois underground du rock kabyle.
Télérama nº 3841 p.47 du 24/08/2023, noté 3/4