Débarrassé de ses pelures, Fabien Martin ne veut plus faire le malin. A contre-courant d'une société de l'image et du clash, c'est terminé les jolies phrases et les belles idées. Jamais impudique, toujours sincère, le disque est porté par un souffle partout présent dans sa musique, que ce soit dans les envolées épiques d'un saxophone (celui du jazzman Raphaël Dumont), dans l'overdrive et le lyrisme de la basse de l'américain Jeff Hallam (longtemps partenaire de Dominique A) qui donne aussi de sa voix sur « I want a lover ». C'est l'album des parcours, des chemins que l'on prend, des blessures qui nous traversent, de ce qui nous constitue et dont les autres ne savent rien. Il consacre un featuring avec l'impeccable Ours (« dans ma boite noire »), à ce thème de nos labyrinthes intérieurs. Nous enveloppant de ses synthétiseurs, s'autorisant des détours groovy, porté par la batterie de Franck Amand (batteur de Catherine Ringer ou de Clara Luciani), ça pourrait être vertigineux, ici, c'est lumineux. Il ne triche plus, ce n'est plus de son âge, ce n'est plus de sa vie. Dans un mélange de vieux piano et de logiciel pour triturer la voix, de bruits enregistrés sur son chemin, il a obtenu le son qu'il voulait. Un cocktail de tradition et de modernité, d'urgence et de cette volonté de ralentir.
Franco Fans nº 104 p.68 du 18/01/2024