Un magnifique voyage au coeur du patrimoine pianistique arménien par le virtuose Jean-Paul Gasparian qui célèbre ici ses racines. En 2022, Jean-Paul Gasparian concluait son premier album pour Naïve dédié à Debussy (V7958, avec les Préludes du Livre 1 et les Estampes) par une transcription inédite réalisée par son père, de Rondes de printemps, la troisième des Images pour orchestre de Debussy. Elle annonçait en filigrane ce nouveau voyage sonore, périple au coeur de l'Arménie, qu'exhausse la figure de Sayat-Nova, centrale pour toute la nation arménienne. De son instrument, le kamântche, ce barde et ashik du XVIIIe siècle, distillait toute sa science poétique à travers des chants devenus l'un des socles de la culture arménienne. Trois des oeuvres présentes ici évoquent directement Sayat-Nova, en particulier les Ballade et Poème de Gérard Gasparian, placées au centre de ce récital, à la suite de la sublime Elégie d'Arno Babadjanian (1921-1983), hommage vibrant à Aram Khachaturian qui, en 1978, venait de disparaître et qui reprend un autre thème de Sayat-Nova. Jean-Paul Gasparian célèbre surtout dans cet enregistrement le plus pur de l'esprit arménien, cet enracinement dans la tradition populaire qu'il scrute avec une joie euphorique tout au long de cette heure musicale, de l'épure minimaliste du Yerangi de Komitas à l'intensité polyphonique de la Ballade de Gasparian, du lyrisme éperdu de l'Adagio de Spartacus de Khachaturian aux chromatismes tendus de la Sonate de Babadjanian. Quel plaisir absolu de retrouver une vision si ardente de la Toccata de Khachaturian ! Jean-Paul Gasparian en retranscrit toute l'énergie primitive, l'intarissable jubilation.
Diapason nº 737 p.95 du 14/10/2024, noté 5/5
Classica nº 267 p.104 du 05/11/2024, noté 5/5